10, Aiguilles
Lorand Gaspar est
mort au début du mois.
Nécrologie dans
le Monde, enfin. Qui pleure un poète si ce n’est d’autres poètes ?
Quant à la vague
de haine contre Peter Handke, elle court sur les réseaux sans vraiment
convaincre. On se rend compte aussi de la vanité des jugements émis de la part
de personne n’ayant rien lu de l’écrivain autrichien, vacuité conviendrait
encore mieux.
Personne sur le
chantier ce matin. C’est samedi.
La mer emplit les
poumons. Donne à voir et à respirer.
Mais on reste à
terre, à court de mots. À court de souffle.
Pourtant ce
journal se poursuit, après une décevante incursion dans une librairie où la
poésie avait été mise au rebut, plus bas que terre pourrait-on dire.
C'est d'ailleurs fréquent, la poésie est mise au plus bas.
J’y ai tout de
même trouvé un beau livre de Paule du Bouchet que j’offrirai aux amis italiens.
La libraire ne se doutait pas qu’il se trouverait un acheteur pour un tel
livre. Savait-elle-même qu’il vivotait dans son magasin depuis un an ?
J’ai aimé
apprendre que le poète André du Bouchet préparait à ses deux enfants des nourritures en forme de
poèmes conçus avec ce qu’il trouvait là où ils passaient leurs vacances.
L’attention qu’il leur portait faisait qu’il pouvait s’interrompre à tout
moment pour se consacrer à eux. Un père. Le mien aussi ne m’a donné que ce qu’il
avait sous la main et c’est beaucoup. Un peu d’opéra, du bel canto, opérettes
aussi, quelques livres, le goût des nourritures en couleur. Et sa bonne humeur.
Poèmes à manger,
à dévorer, à déguster.
Le chantier
abandonné laisse place au silence.
Et à la forêt des
aiguilles.
Bavella.
Le mot est trouvé.
19 octobre
La photo est belle. Mais est-il permis de le dire sans faire remarquer que je ne dis rien sur le texte. C'est que je sens, comme souvent par-ci par-là vos écrits, qu'il présuppose une connivence dans la poésie, un sorte de communautarisme pour employer un mot à la mode ("Qui pleure un poète si ce n’est d’autres poètes ?") je suis renvoyé à ma réalité d'étranger. Cela dit, le texte, je le lis comme une petite musique.
RépondreSupprimerVous n'êtes pas un étranger. Ou alors comme nous le sommes tous. Et puis nous croyons partager un univers. sans qu'il soit identique à chacun, il peut être commun. On peut s'y retrouver.
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