dimanche 2 août 2015

Mais quel mot choisir?

J'ai du mal, a lancé Bosseigne par dessus son bol de café.
Ce n'est pas le même que d'habitude, ai-je commencé.
Non, pas le café.
Guatemala, comme ce peintre, tu sais dont j'ai acquis quelques lithographies.
Non, pas le peintre non plus.
Trois en fait. J'ai trouvé son nom sur Internet. Carlos Merida.

Mais Bosseigne n'a rien répondu. Enfoncé dans le café et dans ses pensées les plus noires, ai-je supposé. Il y avait une légère brume qui bleutait la colline et c'était assez pour ce début de journée. J'avais des lettres à écrire. Bonheurs des étés, écrire aux amis.



J'ai du mal. Vraiment.
Tu as mal quelque part?
(Feignant l'idiotie.)
Tu comprends très bien.
Mais non. Je me demandais si par hasard, à force de ne boire que de l'eau minérale...
Il ne s'agit vraiment pas de ça.

Mal. Un drôle de mot. Maladie. Mal à dire.
Le démon. Et son royaume. Mal au coeur.
Mal au ventre. Mal-veillant. Mal-adroit.
Mal partout de la grippe. Mal d'amour.

Avec tes amies, a-t-il repris, j'ai du mal.
A quoi?
A rien.
Eh bien, si c'est rien, ce n'est pas si mal.
Tu fais exprès. Je ne suis pas bien avec.
Mal alors?

Bien. Faire le bien. Etre bien. Bien-veillant.
Vivre bien avec son parent dans son fauteuil.
Ne plus recevoir ses amies parce que mal.

Tu as eu Joker au téléphone?
Pour le fauteuil?
Oui, je ne vois pas quoi d 'autre.
Prendre de ses nouvelles, par exemple.
Du fauteuil?
Oh, Bosseigne, tu es agaçant ce matin.


Sur une enveloppe qu'un ami cher m'avait envoyée, le timbre choisi était un lion. Et en dessous de mon nom, il avait écrit écrivain(e). Bosseigne à qui je l'avais montrée, n'avait rien dit. Et je n'en avais pas profité pour le lui faire remarquer.

Tant pis, ai-je dit à voix haute.
Hein?
Je ne renoncerai jamais à récupérer ton héritage.
Alors?
On part demain matin chez la Tapissière et on revient avec le fauteuil.
Je ne passerai pas un hiver de plus sans mon fauteuil, a déclaré mon parent en se levant brusquement, renversant sa chaise dans sa sortie brutale.

Nous avions à nouveau un but, ai-je pensé. Ni bien ni mal ne nous arrêteraient dans notre quête. Quant à mes amies, elles ne venaient pas avec nous, la recherche du fauteuil impliquant nos deux personnes seulement.

Je téléphone à Joker, a crié Bosseigne du fond de la pièce.
Bonne idée, ai-je crié à mon tour.

Voilà où nous en sommes.
2 août.
Départ le 3.
Tôt, très tôt.




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