Depuis
quelques jours, la mélancolie d’automne est arrivée.
Nuit
fraîche, drap remonté sous le menton. Fenêtre refermée sur l’unique étoile. Nous dormons
lourdement. Nous éteignons la lumière sur l’été
passé.
Photo Milo Semeria |
Et
nous nous remettons de nos rencontres et lectures en souriant un peu, tête
penchée, tête pensive. Une certaine visite a éclairé beaucoup de nos projets.
Les mots échangés ont fait circuler plus vite le sang dans nos corps. Manger
ensemble a ravivé bien des joies. Et rappelé une marche en forêt accompagné d’un chien joyeux et bondissant.
Et
voilà que le vent se met à souffler à son tour, chassant l’été et les nuages. Reste sur la table
le livre ouvert à la bonne page, celle qu’il
faudra retenir, une sur toutes les pages qui font le livre, une qui parle mieux
que je ne saurais le faire du travail d’écrire.
Il
y a le sac de mots qui nous est confié à la naissance. Il y a aussi un autre
sac. Fait de tout ce que nous ne dirons jamais, de tous ces mots qui ne
passeront pas la barrière de nos dents mais que le crayon peut tracer sur la
page.
Se
rappeler des choses qui n’ont jamais eu lieu.
Qui n’auront jamais lieu.
Là, peut-être se tient celui qui a en charge le travail d’écrire. Peut-être.
J’ai trouvé de quoi écrire quelques
lignes sur des dessins. Bandes horizontales. Venus d’on ne sait où, des bribes ont traversé
l’étroit espace qui m’était imparti.
Tu commences à écrire
et tout se complique les points sur les i partent à la dérive et toute la
langue les suit comme un seul homme.
ou
Il faut renverser la
mer pour en faire un ciel et peut-être irons-nous mieux enfin ?Éviter le
piège de la ponctuation ? Remettre en désordre.
ou
Ça n’a pas commencé ça a commencé sans prévenir ou plutôt d’autres signes que des mots lettres une série de points de
quoi rendre fous les tenants du point à la ligne mais la virgule a de quoi les
tenir en respect tous les affiliés à la règle commune et nous avons fourbi nos
dernières armes affûtant nos crayons
alors ça a pu commencer
ou
on aura essayé se
dit-on de changer le monde sans y parvenir
ou
parfois on rêve de
changer de nom de pays de sexe de corps de visage et de langue
ou
ne pas faire autre
chose que refuser ce qui ne peut s’accepter
ou
quelqu’un a dit l’art ce
n’est pas une affaire
de femmes alors nous on demande si c’est une affaire humaine ?
ou
où es-tu toi que je
cherche partout où tu n’es pas
Mais
ça ne suffira pas. À faire revenir l’été
dans la chambre.
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