lundi 2 octobre 2017

Où vont les morts, demande le Petit, demande Emily Dickinson

Pour Sébastien R.

On croit voir.
On croit vivre.
Et on voit, et on vit.
Comme on ne croit pas mourir un jour.
On meurt.

Sébastien Rongier écrivain retardataire.
En hommage à l'heure des départs. Soir et matin très tôt.
Départs.
Celui de Walter Benjamin, celui de Philippe Rahmy-Wolf.
Tous deux, des écrivains retardataires et tôt en allés.
A Montbrun les Bains, une plaque de marbre et un nom.
Plusieurs noms, le nom d'un homme, le nom d'un camp.
Mauthausen.

Après ça, le leurre d'un oiseau,
pas grand-chose dans l'espace bref d'un ciel d'automne.
Cou tordu à tenter de voir ce qu'on croit voir.
On est vivant, on devient seul.
De plus en plus.
Non pas sans amis, mais seul.
Et on va, on vient, on regarde.
On croit voir.

Où vont les morts, redemande le Petit plus fort.
Où?
Sa belle tête tournée vers nous qui n'avons aucune réponse.
Qui croyions en avoir.
Et puis non, trop de morts partout, tout le temps, inconnus, amis, ennemis aussi.

Hier Marseille. Deux morts, dit la radio. Trois.
Mais non, deux. Victimes. L'autre, ça ne compte pas.
On croit savoir ça aussi.
Puis non.
Le compte s'arrête là.

Et l'oiseau dans le ciel accroché au toit.
N'est pas vrai.
Pas la chouette sage vers nous penchée.
Non.
Un leurre à faire peur aux pigeons.
On croyait voir un oiseau vivant.

Même la lecture peut être un leurre.
On lit une chose, une autre est écrite.
Quelqu'un lit à sa manière et la sentence tombe.
Je voudrais écrire ça.
Juste ça.
Y aller de ma justesse pour rétablir la justice.
Envers un écrivain?
Leurre.


Restent les cerfs.
Leurs brames entendus dans la nuit du Jabron.
Et les oiseaux et leurs plumes, vraies ou fausses.
Le Petit connaît la tristesse.
C'est une plume passée doucement dans son cou.
Le Petit nous apprend les sentiments.



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