jeudi 26 septembre 2013

La Suisse, pourquoi pas, le vin certainement...

C'est par ces mots que la soirée s'est terminée.
Ensuite Bosseigne a filé sans ajouter un soupir.
Fatigué, épuisé, mais content du vin que nous avons partagé.

La nuit a été tourmentée. Je ne sais pas si c'est à cause de ce Negroamaro des Pouilles. En tout cas, entre Frénaud et Cingria, j'avais de quoi faire. Ou plutôt ne rien dormir.
Au matin, comme toutes les nuits agitées, l'espoir que le jour soit plus avancé que ce que la fenêtre le laissait supposer m'a poussée à me lever pour entonner le chant du café mexicain.
Seule ou pas, ai-je pensé.


Matin gris. Au jardin, les feuilles craquent déjà sous les pieds.
Le gris s'est trouvé ragaillardi par du rouge. Une fraise. Je l'ai mangée sans penser à mon parent. Ce rouge qui n'était pas celui du vin était réconfortant pour démarrer le jour gris qui s'annonçait au-dessus de nous.

Je me suis demandée si la nuit que je venais de passer n'avait pas été perturbée par les icebergs dérivant et le froid terrible qui régnait sur le Spitzberg. La désolation autour de mon lit, bleu et blanc, et si paisible, était impressionnante. Comment survivre par de telles températures négatives? J'avais chaud pourtant. La fenêtre ouverte sur la nuit apportait à peine un peu d'air frais. Alors j'ai délaissé le livre que j'étais en train de lire (B.Pilniak) pour la Chine (Jia Pingwa). Mais le vin m'a rattrapée et je me suis plongée dans André Frénaud.

En rêvant de Cingria.

Ce fauteuil, a commencé Bosseigne, on ne le récupérera jamais.

Mon parent avait sa tête des mauvais jours. Pas envie d'en savoir davantage. Encore le Negroamaro, ai-je pensé. Rien en vaut un café pour chasser les mouches de la nuit.

Pas mauvais, a concédé Bosseigne. Du mexicain?
Trouvé chez le petit épicier.
Je suis désolé, a repris mon parent, mais ce mal à la tête...
Oui, le vin n'était pas suisse.

Bosseigne a éclaté de rire. Ouf, me suis-je dit, mon parent n'a pas la migraine. Juste mal à la tête.

J'ai mangé une fraise ce matin. Et je n'ai pas su quoi faire des cadavres.
Les poules tuées par la chienne des voisins?
Oui, les cadavres me glacent. Et ces plumes sur ces corps rigides. Je ne suis pas courageuse.
Je m'en occuperai tout à l'heure.
Une seule fraise, Bosseigne, alors je l'ai mangée.

Bosseigne s'est arrêté de boire son café, a reposé sa tasse préférée, m'a regardée attentivement.

De quoi faire une nature morte, la fraise et les deux poules mortes, la vie et la mort et toi qui te régales!
Bosseigne!
Je me trompe peut-être: toujours ce goût des extrêmes chez toi...
Le gris et le rouge, et un peu de noir aussi.
Tu vas à Marseille aujourd'hui?

J'ai opiné du chef comme ça se dit dans la langue. Oui, j'y allais. Et comme souvent, ça me serrait le ventre. La ville maternelle. Mais oui, j'y allais. En train de surcroît.

On ne va pas abandonner ce fauteuil hors de question!
Oui, mais...
On va se débrouiller pour le récupérer.

Pour l'instant me rendre à Marseille, en revenir ce soir.
Et retrouver un lit, blanc et bleu, le mien.
Entouré d'une mer vineuse et d'icebergs.
A traverser.
Voilà.




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire