vendredi 8 juillet 2016

A propos du verbe poursuivre, dit Bosseigne

Pour les grammairiens, le verbe transitif est suivi d'un complément, toujours.
Comme route.
Et pour certains, travail. Ou vengeance.

D'autres encore, ai-je interrompu mon parent, en poursuivent d'autres.
Et une chimère aussi.
Comme mon fauteuil, a dit Bosseigne, soucieux.

En fait, c'est nous qui poursuivons.
Nous, toi et moi, a repris mon parent?
Non, nous tous, les autres, toi et moi.
Au sens le plus large. Humain, animal, végétal.



Oui, a soupiré Bosseigne. À l'impératif, certains disent: poursuivez!
Pour trouver poursuivre dans le dictionnaire, on te renvoie à suivre et tu traverses le suicide, la suie, sans oublier suisse, suite, et hop!
Tout juste si on ne te persécute pas à lire les étymologies du verbe.
Je ne suis pas sûr que le verbe poursuivre ait un sens aussi large.
Relis le dictionnaire.

Pour moi il relève plutôt de l'obsession étroite.
 Parce que tu l'associes trop vite au fauteuil, mon cher Bosseigne.
Moi je le relie plutôt au cheminement. Toda a vida.
Ne pas s'interrompre. Continuer à respirer.

Le chemin et le souffle?
Quand tu gravis la montagne, tu poursuis ton chemin en respirant.
Parce que converser en gravissant la montagne coupe le souffle.
Et la conversation.
Lenz, l'ai-je interrompu, Lenz plongeant dans la fontaine froide un 20 janvier.
Puis Celan, a poursuivi mon parent, dans l'eau glacée du fleuve. Toujours la même date. Et la montagne.
Mais ce n'est plus cette fois le Ban de la Roche.
Mais tout de même le bannissement pour Lenz.


Plonger, est-ce poursuivre?
N'est-ce pas mourir?
Ou tenter d'interrompre?
Ce qui est en route.
En toi, dans le monde.

Toi, tu me poursuis.
Moi, je te poursuis?
Nous poursuivons ensemble.
Quoi?

Celan poursuit Lenz que poursuit Büchner.
Tous poursuivis par le même monstre terrifiant.
Et nous?
Nous tentons de les suivre et d'échapper à la neige.
Au froid surtout qui s'ensuit
et nous poursuit.
Jusqu'au bout.


 



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