AUTRES PAYS
I, La Chine
Je
suis en Chine ce matin.
Pas
besoin de dire où.
Ca
n’existe pas ici.
Il y a
trop de vide dans ce genre de maison.
Donc
ils enlèvent tout ce qu’ils peuvent.
Aucune
raison de chercher sous la langue.
Assieds-toi
plutôt.
Chercher
pour trouver un pays de rien.
Vieille
Chine, ce matin.
Ne
cherche pas ici. Ni dans les mains ni ailleurs.
La
Chine, c’est très grand comme langue.
La
nôtre est bien petite, elle tient facilement dans la bouche.
II, les renards
Les
renards ont rejoint la forêt cette nuit.
Il n’y
en a plus un seul dans la chambre.
Tu
n’en trouveras aucun dans ma bouche.
Même
les très petits sont partis.
Assieds-toi.
Repose-toi un peu.
Chaque
fois qu’ils viennent,
c’est
pas qu’ils sont…mais ils ne veulent pas
que
d’autres que moi les mangent.
Malheureusement,
des gens périmés, il y en a.
On
oublie parfois de les remplacer.
Et
alors, après avoir mangé des saletés, ils meurent.
Oui,
comme moi.
Les
renards aussi.
III, la langue maternelle
Si je
te demande comment va ta petite femme,
tu me
réponds : j’ai un mari.
Et moi
je te dis qu’il est ravi. Et toi, tu ris.
Mari/ravi
rime à quoi, rime à rien.
De
l’œil, celui qui voit les renards, descend une pantoufle.
On
peut y boire dedans, elle est en verre.
De
l’autre descend cette voix qu’on entend sous le fauteuil.
Il
paraît qu’une huppe habite là. C’est comme ça.
D’autres,
c’est l’oreille ou l’œil, elle, c’est le fauteuil.
Tu dis
que ta mère aime rire.
Mais
tu oublies :
ça
donne un brave travail les mots dans une bouche,
comme
les enfants,
quand
on en a beaucoup.
in Le Paradis
de l’oiseleur, édition Al Manar, encres Guy Calamusa, 2013
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