samedi 29 février 2020

conte des filles (I)


Nos arbres ont racines en l’air
branches en bas grand branle
bas de tilleuls et magnolias
sur l'adresse biffée des cerisiers
plus tard on écrira rue de l'olivier
à pianoter sur un harmonica
en quoi et où  ira  le courrier
dans la boîte et hop c’est ça
mais à la fin que me veux-tu
je ne sais pas écrire le nom.


colliers et bracelets m’ont
étranglée avant que née
la lignée s’interrompe
le sommeil prend la place
ouvre les yeux vite
dit l’enfant

loin
a passé en deux enjambées
le père
sur ses épaules n’y avait enfant
ni femme ni rien
un seul mot


vendredi 28 février 2020

Guennadi Aigui/Maria Grazia Insinga/Blanchot

Pour agir, il faut cesser d'agir.
Maurice Blanchot
(...)
et donc la vraie pensée c'est le sommeil
et donc refuser de rester debout à veiller
abandonner au rêve la faculté de penser
une erreur en prose une entrave la veille

quatrain extrait de son recueil Tirrenide
2020
traduction SD
Anterem edizioni




jeudi 13 février 2020

Le pain cuit...

Et je n'écris pas.
Ou, un peu.
Trois mots, encore un impair.
Il ne pleut. Comme dit mon ami italien.

Pas besoin d'imper donc.

On a pris un auto stoppeur polonais, la semaine dernière.
Nous allions écouter Jean de  Breyne.
Bien beaux textes. Un poète.
La lecture de poèmes à haute voix interroge celui qui écoute.
Voir Akhmatova ou d'autres.
Seule la voix du poète, même tremblée, silencieuse.
Me reste en mémoire.
Blanche voix de James Sacré par exemple.
Qui ne cherche pas à séduire. Seulement dire.

Jérôme était le nom du voyageur polonais.
Lui allait à Ganagobie.
Nous, à Banon.
On a parlé un peu.
Il aimait la poésie.

J'avais envie de dire en ce moment je vis en Russie.
Mais ç'aurait été source de malentendu.
Idiot de ma part.
Pourtant Tchouvaskaia ne me quitte pas.
Entretiens, la Plongée, tous deux publiés au Bruit du temps.
Les appartements communautaires. À Piter ou Moscou.
Et le long poème d'André Markowitcz.

La Pologne découpée, déchirée, j'irai bientôt,
ai-je eu envie de dire aussi.
Mais dans les limites ouvertes des livres.

Le pain est cuit. Quatre mots.
Le poème s'interrompt.
Le nez coule et les yeux.
On s'en va.







mardi 4 février 2020

Commettre un impair, dit la langue.



Assassiner, tuer la poésie en écrivant sans compter.
Je marche, je dis je parce que deux genoux les miens m’entraînent dans les vergers.
Je les suis, je suis eux, nous sommes deux ensemble(s). 
Nous, noués, nous-eux.
Nous avançons dans le paysage plat qui entoure la maison où les genoux et le reste de mon corps, ma tête aussi et les idées qui se trouvent non pas dedans, mais derrière, habitons.
En marchant on compte beaucoup sur ses genoux, on compte en soi, dans sa tête le nombre de pas, les maisons, les gens qui se trouvent sur les chemins ou dans les oliviers occupés à les tailler puisque c’est la saison, en fait on ne sait plus en quelle saison on est, me dit M.Étienne. Heureusement le vent rafraîchit sans brûler les bourgeons. Disons-nous, lui occupé à me serrer la main et moi, occupée à lui sourire en acquiesçant.
Il compte sur moi pour que dans les mots échangés, ni l’un ni l’autre n’en dirons plus qu’il n’en faut. 
Nous épargnant l’impair fâcheux.


Quand on marche, on écrit en silence et quelquefois à voix haute, mais jamais on ne dessine. Ni en silence ni en parlant ; le dessin ne se parle pas en marchant.
Ça non plus, je n’en dis rien au voisin qui taille ses oliviers.
Ce sont les poèmes aux vers impairs, ceux de Verlaine, qui souvent font signe.
Parce que je ne sais pas compter ?
Nous recherchons la meilleure forme à donner à.
Des tas de choses, une robe, un dessin, un poème.
Les ciseaux servent à.
Couper, compter.
L’exacte forme à trouver.

5 février