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Ich se demande s'il pourrait un jour écrire un traité
sur le mouvement des arbres les jours de vent. Puis se souvient que c'est
dimanche et s'allonge au soleil.
Il repense au titre
d’un dessin : la mémoire de l’oubli.
Et aussi à une
remarque à propos d’une expression lue dans un livre : la mémoire pue.
Ich se demande.
Souvent se pose des
questions et être allongé au soleil est propice au questionnement.
Même si l’herbe veut
distraire Ich, avec les papillons et le vent.
Ich se souvient avoir
oublié les deux merveilleux vers que la nuit lui avait donnés.
Ça m’apprendra à ne
pas noter ce qui arrive et préférer dormir plutôt qu’attraper au vol le poème,
soupire Ich.
Puis il se met à
somnoler.
À rêver.
Qu’il vole.
Et tombe.
Heureusement Ich est
au ras du sol. Ne se fait donc pas mal.
Mais se réveille de
méchante humeur.
Lui revient alors l’étrange
manie de certains de ses contemporains de marquer férocement leurs possessions
et habitats. Ma chambre, ma cuisine, mon jardin.
Se dit encore une
fois qu’il ne possède rien, pas même la mémoire.
Pourrait se définir à
l’aide du préfixe privatif -a-.
L’a-mémoire, voilà ce
que Ich trouve dans l’herbe ce matin ;
S’en fait une joie.
Court dans la maison
écrire, trop peur d’oublier, puis se met à rire si fort que la voisine,
par-dessus le mur, lui crie : Ich, ça va ?
Oui, oui, au mieux,
répond-il.
Tout en continuant à
rire.
Bon dimanche Ich, dit
la voisine.
Pour toi, la même
joie, répond-il en silence.
L’a-mémoire.
Pavots, détail, susanna lehtinen |