mardi 7 avril 2020

Fragment inconnu

On habille le matin avec ce qu'on trouve au pied de son lit.
Un mot de 5 lettres le plus souvent: porte, morte, perte, mots de cette sorte.
Ils ralentissent le mouvement, l'arrêtent presque tandis que peu à peu, de mots et d'autres, s'habille le matin à commencer ensemble.
La tête pèse parfois au bout de la tige, mais il serait vain de la couper.
Et puis tout peut attendre.
Sauf le café qui remplace le sang.
Et fouette la journée durablement.
Certains, m'écrit-on, se servent de la musique.
Tout est bon pour tenir debout.
Cette période pourtant incline au sommeil, ou, tout au moins, à l'allongement.
Si fatigant parfois le soleil, si épuisante la poussière du chemin.
Porte, on l'ouvre.
Perte, on la porte en soi.
Morte, toujours finit par arriver devant elle.
Mère morte.
Ainsi filent les nuits, les matins et les jours au pays que j'habite.
Je n'y vis pas seul. Entouré d'une foule.
Durablement présente et silencieuse, elle fouit tout autour sans se lasser.
Il m'arrive de l'entendre en dormant. Une foule de bêtes en tous genres, insectes sûrement dans le bois des poutres, et  petits mammifères à galoper au-dessus de moi.
C'est ainsi que nous vivons. Les autres, même s'ils ne me voient pas et qu'il m'arrive de les apercevoir à peine, vivent la même existence.
D'une sorte que je sens différente de moi, sans savoir ce qui nous rend si différents.
Je ne les connais pas. Ils ne me connaissent pas.
Mon matin aujourd'hui s'habille de peu. Grisaille et  soupirs.
Non que je me plaigne, je constate simplement ce que j'ai à ma portée. Très peu.
Eux, ceux qui ne me voient pas, se plaignent tout le temps. Je les ai entendus gémir.
Il faudrait pour leur clore le bec un mot de cinq lettres!


dessin SD



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